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Snowkite Nordic Expedition : Helags – Sweden

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Après avoir passé un hiver à chercher la neige dans les Alpes du Nord… l’envie de blanc et de grands espaces commençait à se faire sentir… Et comme les choses sont bien faites, toute la neige que nous n’avons pas eue chez nous est tombée sur les pays Scandinaves.

Je décide alors de rejoindre mon ami Ivan (Freeairadventures.com ), qui propose des camps de snowkite en Suède. Cela fait quelques temps qu’il me parle d’une petite expédition qu’il souhaite réaliser  sur les montagnes de la région du Härjedalen, et en particulier la mythique Helags (1800m d’altitude, avec son glacier, le premier au sud du Cercle Polaire). Ce qui fait la force des montagnes nordiques n’est pas leur altitude, mais leur accès, et la météo qui y est souvent extrême et très changeante.

Ivan a planifié un circuit de 130km environ, à vol d’oiseau, sur un minimum de 4 jours, basé sur les prévisions météos. Mais nous savons déjà que nous devrons nous adapter aux changements…. nombreux.

Départ le 1er Avril à la mi journée depuis la station de Ramundberget. Pour espérer sortir les voiles, nous devons d’abord nous hisser 400m plus haut pour sortir de la forêt  et atteindre le plateau. Mais nos 40kg de matériel (par personne bien sur) répartis sur deux luges nous rappellent à la dure réalité de la gravité…. Après une bonne suée à skis de randonnée, les arbres se dispersent pour laisser place aux grands espaces blancs. Visibilité excellente, tempête de ciel bleu…. mais des rafales à 1m/s… Nous tentons néanmoins un début de progression, mais avec si peu de vent il est trop difficile d’avancer. Au bout de 3-4km nous décidons de nous poser et préparer notre camp pour la nuit, car une tempête est annoncée avec des rafales à 20m/s.La nuit tombant, la température chute rapidement aux alentours de -10°C. Mais la tente est solidement arrimée, et nous avons monté un mur de neige vers le Sud Est, orientation depuis laquelle doit arriver la perturbation. Bien au chaud dans nos doudounes en duvet d’oie, nous profitons d’un repas sous les étoiles avant de rejoindre nos sacs de couchage.

Au milieu de la nuit, nous sommes réveillés pas le vent qui secoue la tente. Il semble que de la neige lourde, ou de la pluie, se mêle aux rafales. Mais rien de bien fort au final, et nous pouvons nous rendormir jusqu’au petit matin.

Samedi 2 Avril : la tente est prise dans un brouillard épais. Le vent se fait encore sentir derrière notre mur de neige. Réponse à notre question : il a bien plu cette nuit, ce qui n’est pas du plus agréable au réveil. En effet, quand on campe en hiver, il vaut mieux un bon froid sec qu’une ambiance humide, que ce soit pour les vêtements ou le matériel (tente, duvets, etc..)

Toutes les affaires sont rapidement pliées sur les luges. Malgré une faible visibilité, nous décidons d’avancer. Quoiqu’il en soit, nous avons marqués les points sur nos GPS afin de ne pas nous égarer. Par sécurité, nous choisissons de ne pas trop nous éloigner de la seule « route » pour les motoneiges. Bien qu’il ne passe pas grand monde par ici, en cas d’accident nous serions plus faciles à repérer.

Le vent souffle à plus de 10m/s. Sur une neige plutôt dure, nous avançons prudemment dans sa direction, ce qui ne facilite pas les choses. Ivan utilise sa MontanaVI 7m² alors que j’opte pour l’ApexIII 7,5m².  Nous aurions préféré d’évoluer au travers, mais ne soyons pas trop difficiles : au moins, ça marche ! Au sommet d’une butte, la visibilité semble s’améliorer vers le Nord… nous permettant de voir les 20 prochains kilomètres… Une bonne chose ? Je ne crois pas. Nous découvrons au loin Helags dont la tête est prise dans les nuages. Entre elle et nous, une immense plaine visiblement ravagée par les nombreuses tempêtes de l’hiver, laissant d’innombrables taches noires de terre et de roche. J’avoue marquer une pause sous mon kite, le temps de réaliser où nous allons. C’est un peu la sensation de se jeter dans la gueule du loup, sans réelle possibilité de retour (contre le vent), et sans trop savoir comment va évoluer la météo dans les heures à venir… Mais Ivan m’avoue ressentir le même stress, ce qui me rassure : seuls les inconscients n’ont pas peur ! 😉 Ce terrain impose le respect, c’est certain. Quoiqu’il en soit, si le temps se dégrade, nous nous abriterons sous la tente avec un bol de thé !

Au fur et à mesure que nous progressons sur le plateau, entre buttes et dépressions, le vent est très changeant, tombant parfois à zéro pour quelques secondes, avant de repartir de plus belle. Il vient même à tourner à 180°… sans explication. L’aérologie est décidément une science très complexe… Les séances de kite, d’attente et de marche se succèdent.

Au bout de 20km, la première décision et changement de plan s’impose : Le vent ne nous permet pas d’avancer vers notre destination initiale (Sylarna mountains), en tout cas pas en sécurité. Nous contournons alors la montagne d’Helags par l’Est plutôt que d’aller vers l’Ouest, et rejoignons la Fjälstation (refuge) au pied de sa face Nord. La journée a été longue et fatigante, je commence à ressentir le froid… il fait gris et les prévisions météo affichées au refuge son contradictoires. Le moral n’est pas au plus haut… alors il est temps de sortir notre arme secrète : du vin Chilien précieusement calé au fond de la luge ! Entre un Français et un Italien, c’est bien la moindre des choses….

La nuit suivante, nous ne dormirons presque pas… Bien qu’ayant monté la tente à l’abri, et fortement arrimée au sol, celle-ci claque, tremble, s’écrase sur nos têtes à chaque rafale… L’anémomètre du refuge enregistre des pointes à plus de 100km/h. Une seule chose à faire : rentrer la tête dans le duvet… et attendre.

C’est le soleil sur la tente qui nous réveille au matin. Un regard glissé par le Zip de la porte nous apporte une bonne nouvelle : grand bleu à l’horizon ! La falaise nord d’Helags se dresse devant nous, noire, gelée, imposante. Au sommet, les nuages nous indiquent que les vents soufflent encore en tempête. Mais ici, nous sommes à l’abri. Petit déjeuner avalé, nous préparons rapidement nos affaires pour la journée. Au programme : laisser les luges sur place de façon à rejoindre la crête sommitale, et aviser des conditions une fois là-haut.

L’ascension est plutôt facile avec les skis de randonnée. La pente est régulière, malgré les très nombreux rochers et la neige pelée. Le paysage vers le nord est splendide, et confirme à nouveau que l’endroit est immense et sauvage. Nous avons emporté chacun une voile de Speedflying, et un snowkite, ce qui rend les sacs assez lourds. Nous surplombons alors le glacier au pied de la falaise. Le paysage est digne d’une ambiance « haute montagne » dans les Alpes. Encore une fois, ici l’altitude n’est rien…

Au moment où nous atteignons la base de l’arête sommitale, nous sommes pris dans une nappe de brouillard qui arrive par le Sud. Le vent est soutenu mais supportable (10m/s) alors nous décidons d’aller voir côté sud si les conditions peuvent nous permettre de voler. En effet, Ivan n’a qu’une seule idée en tête : décoller depuis Helags avec sa 18m Bobcat… Nous trouvons une zone de neige assez « propre » et bien orientée face au vent. Il décide d’y aller…. Son décollage est un peu laborieux avec les skis aux pieds et le vent qui le tire en arrière. Je dois le pousser de toutes mes forces pour le lancer dans la pente et le voir prendre son envol, avant de disparaitre dans la pente. Ca y est, il l’a fait ! 🙂

Resté seul au sommet, je décide de garder ma voile de Speed au fond du sac par sécurité. La face Sud semble bien enneigée: j’engage alors ma descente, enchainant les grandes courbes sur une neige parfaitement « décaillée » et lisse. La vue sur la plaine est saisissante, sans parler de la pointe de Predikstolen qui s’élance vers le ciel. Je laisse aller mes skis à pleine vitesse, et monter le plaisir. Je suis seul à skier cette montagne… et c’est tellement bon !

Au pied de la face, c’est un autre monde. Le vent est nul. La neige humide, le soleil de midi tape fort. Il doit faire 20°C de plus que là haut. Je retrouve Ivan en t-shirt qui plie sa voile, un large sourire collé sur le visage. Il est aussi satisfait que moi par sa descente, même si nous n’avons pas choisi les mêmes « jouets ».

Motivés, nous repartons dans la face Sud en espérant retrouver un peu de vent pour cette fois gonfler les kites. Après 300m de peaux, la brise vient à nouveau caresser nos oreilles. Les MontanaVI 9.5m² frétillent au fond du sac et ne demandent qu’à nous hisser en douceur vers le sommet… C’est à nouveau un sentiment très fort que de réaliser cette ascension. Au-delà du fait que c’est une première, le paysage en contre bas est tellement vaste qu’il semble que nous kitons en plein ciel.

En quelques minutes, nous arrivons sous l’arête sommitale. Le vent à baissé, la température est agréable, et nous profitons une dernière fois de la vue avant de redescendre à ski vers le refuge, cette fois pas la face nord.

Quelle journée ! De la randonnée, du speedflying, du ski et du snowkite… dont 2 ascensions d’Helags en l’espace de quelques heures… Nous avons du mal à réaliser ce que nous avons fait, mais surtout de la chance que nous avons eu avec la météo. Merci Helags !

Nous pourrions nous arrêter là, fatigués et satisfait … mais non ! Au refuge, le vent souffle dans la bonne direction pour entamer le trajet retour. C’est une chance que nous ne voulons pas rater… car tirer les luges de 40kg sur plus de 30km n’est pas très motivant. Il est 17h, et nous voilà repartis. Pendant 2 heures, nous tirons des bords contre le vent, en remontant vers le Sud. Mais peu avant le coucher du soleil, Eole décide qu’il est temps pour nous de planter la tente, et arrête le gros ventilateur. Tant mieux, nous sommes au bout de nos forces.

C’est une nuit calme et fraiche (-15°C) qui s’annonce. Mais nous sommes tellement heureux de notre journée, que nous ne sentons pas vraiment le froid, et célébrons cette expérience avec un bon plat de carbonara accompagné de notre vin Chilien, les yeux levés vers les étoiles.

Lorsque je me lève vers 7h, la tente ne bouge pas : c’est mauvais signe…  Mais après seulement quelques minutes, un léger vent se lève du Sud Ouest. Nous commençons alors une longue remontée au vent vers Ramundberget, d’abord dans un vent faible, nous obligeant parfois à remonter les buttes à pied. Mais plus nous avançons, et plus il semble se renforcer, jusqu’à devenir très soutenu. Au loin, une nouvelle perturbation semble venir dans notre direction. Après 4 jours d’expédition, l’idée de passer une nouvelle nuit sous la tente dans la tempête n’est pas des plus motivantes… . Nous nous accrochons alors plus fort à nos kites et cherchons notre route au milieu des rochers, en cherchant toujours à optimiser notre remontée au vent pour rejoindre notre point de départ.

En début d’après midi, nous arrivons à notre camp de la première nuit. Il ne reste plus que 3 kilomètres sous le vent pour retrouver la voiture. Le stress est derrière nous. Pour fêter çà, nous nous offrons une petite session « freestyle » sans les luges, histoire de faire quelques sauts et jouer avec le vent. La descente dans la forêt au milieu des arbres avec les luges est un peu acrobatique, mais nous arrivons sans encombre à la voiture vers 15h. Le GPS indique que nous avons parcouru 80km depuis ce matin… il en aura fallu des bords pour remonter contre le vent au milieu des rochers ! Au total, c’est bien 130km que nous aurons parcouru sous nos kites, après 4 jours sur les hauts plateaux.

Nous partageons une bière bien méritée dans un Pub de Funäsdalen. Je peux voir la fatigue sur le visage d’Ivan, mais je sais que je ne vaux pas mieux ! Nous échangeons à chaud sur cette expérience : le plaisir, les émotions, le partage, le stress voir parfois la peur… mais surtout le respect qu’impose cet environnement où même les arbres ne poussent pas…

Helags nous a accueillis et a été plutôt clément avec nous…  Merci.

Alors, à quand la prochaine ? Je ne sais pas. Ce sont les moments improvisés qui sont souvent les plus appréciés. Mais j’avoue avoir jeté un regard par-dessus mon épaule vers les montagnes de Sylarna, qui semblent être un formidable terrain de jeux…

Un grand Merci à nos sponsors : HQ Powerkite – Bergans of Norway – Julbo – Volkl skis et Olympic sports

Et une grosse pensée pour Morgan qui a du rester au pays à cause d’un genou en moins….

www.freeairadventure.com

www.flymountainsnowkite.com

Vidéo par Ivan :